Si vous êtes adulte et vivez au Canada, il se pourrait que vous connaissiez quelqu’un qui agit comme proche aidant, ou que vous le soyez vous-même. Selon les données les plus récentes, pas moins de huit millions de personnes âgées de 15 ans et plus, au pays, fournissent des soins et du soutien à un proche en situation d’incapacité. Et, comme on peut le voir dans le graphique suivant, ce sont plus souvent les femmes qui se retrouvent à assumer cette délicate mission.
Plus encore : dans la tranche des 65 ans et plus, c’est une personne sur quatre qui agirait comme proche aidante.
L’autre côté de la médaille
L’allongement de l’espérance de vie serait en partie responsable du phénomène. On vit plus longtemps, mais plusieurs des années additionnelles que la vie nous accorde sont une période où, pour diverses raisons de santé, on doit de plus en plus compter sur une aide extérieure pour les tâches du quotidien. La liste est longue : l’alimentation et les courses, l’entretien du domicile et les corvées ménagères, les visites médicales et la prise de médicaments, l’hygiène et les soins corporels… Et pour un proche, il est naturel de vouloir prêter main-forte.
C’est une responsabilité importante, et elle peut devenir particulièrement exigeante pour les personnes en début de retraite : il n’est pas rare que celles-ci doivent se soucier à la fois d’un parent ou d’un conjoint malade… et de leurs enfants, si ceux-ci ne sont pas encore autonomes financièrement ou sont eux-mêmes invalides. Selon un sondage fait récemment aux États-Unis, les membres de cette « génération sandwich » dédieraient des dizaines d’heures par semaine à aider la génération qui la précède – et celle qui la suit.
Le coût sur la personne
Agir comme personne proche aidante peut être extrêmement exigeant. En moyenne, on estime que les proches aidants, au Canada, consacrent plus de 19 heures par semaine à cette tâche qui comporte une lourde charge émotive. Il n’est pas étonnant que plusieurs disent ressentir un stress important qui trouble leur stabilité émotionnelle et entraîne de la difficulté à se concentrer, des troubles du sommeil, de l’épuisement, de l’anxiété, voire un état dépressif. En fait, près d’un aidant sur quatre fait état d’une détérioration de sa santé générale causée par la prestation de soins.
Et c’est sans parler du coût financier.
Le coût financier
Comme on peut le voir dans ce graphique, lorsqu’on demande aux personnes proches aidantes de préciser le type de soutien dont elles ont besoin, c’est le soutien financier qui ressort en premier.
Un proche aidant dépenserait environ 7 600 $ par année aux soins de la personne aidée. Ces dépenses seraient consacrées notamment à l’achat de matériel médical et d’adaptation, aux soins à domicile, à l’aménagement du domicile, à l’aide-ménagère, au transport, aux médicaments non couverts par les assurances et, dans certains cas, à l’hébergement dans un établissement spécialisé.
Mais il y a aussi un coût financier invisible. Pas moins de 6,1 millions de proches aidants canadiens doivent, tant bien que mal, combiner ce rôle avec leur activité professionnelle. Plusieurs rapportent devoir prendre de nombreux congés non rémunérés, voire interrompre leur carrière ou passer à côté d’occasions professionnelles.
Enfin, pour toutes ces raisons, il n’est pas rare qu’un proche aidant voie sa capacité d’épargne réduite et doive réviser ses plans de retraite.
L’aide gouvernementale
Peut-on alléger ce fardeau?
Différents programmes gouvernementaux existent pour les personnes proches aidantes. Au palier fédéral, le principal est la Prestation pour proches aidants de l’assurance-emploi, qui peut procurer jusqu’à 55 % de sa rémunération à la personne proche aidante (jusqu’à concurrence de 668 $ par semaine) pendant un certain nombre de semaines. Le programme comporte aussi une prestation de compassion pour les personnes qui accompagnent un proche en fin de vie.
D’autres programmes et des crédits d’impôt sont aussi offerts aux deux niveaux de gouvernements, notamment pour les parents d’enfants handicapés.
Prévenir, à défaut de guérir
Par ailleurs, il existe trois principaux outils pour prévenir qu’une condition qui vous rendrait vous-même invalide dans le futur entraîne un coût financier important pour les personnes qui vous viendront en aide.
Le premier est votre épargne personnelle. En constituant, au fil des années, une somme d’argent importante qui pourra être utilisée pour vos soins, vous pouvez éviter à vos proches de fragiliser leurs propres finances pour vous aider.
Le deuxième, si vous êtes actif professionnellement, est l’assurance invalidité. Aussi appelé assurance salaire, ce type d’assurance vous procure un revenu de remplacement advenant que vous deveniez dans l’impossibilité d’accomplir votre travail.
Enfin, vous pourriez vous informer sur l’assurance maladies graves. Celle-ci prévoit le versement d’une somme forfaitaire suivant le diagnostic d’une maladie grave parmi une liste prévue au contrat. Cette assurance peut aussi comporter un service d’accompagnement, notamment sur le plan psychologique.
En terminant, il serait aussi important de préciser par qui et de quelle façon vous souhaitez que soient assumés les soins à votre personne et la gestion de vos biens si vous devez inapte. Cela peut être fait, selon la province, par une procuration ou un mandat de protection.
Votre conseiller peut vous aider à voir clair dans cet enjeu et à éviter que d’éventuels problèmes de santé ne deviennent aussi des problèmes financiers.
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Les sources suivantes ont été utilisées dans la rédaction de cet article.
AARP, « Managing a Paid Job and Family Caregiving Is a Growing Reality ».
Desjardins, « Assurance maladies graves ».
Family Caregivers of British Columbia, « The financial impact of caregiving ».
Forbes, « How To Self-Insure For Long-Term Care Health Expenses (2022) ».
Gérez mieux votre argent, « Planification des soins de longue durée ».
Proche aidance Québec, « Statistiques ».
SFL, « La santé mentale : un enjeu de société qui peut être aussi un enjeu financier » ; « Le mandat en cas d’inaptitude : nécessaire, mais peut-être insuffisant ».
Société canadienne de psychologie, « Le stress de l’aidant ».
Statistique Canada, « Nouvelles données sur l’incapacité » ; « L’expérience et les besoins des aidants âgés au Canada ».