Il y a une dizaine d’années, Julie et Charles, qui étaient alors un jeune couple dans la trentaine, ont démarré ensemble une entreprise dans le domaine des technologies numériques. Leurs affaires ont prospéré au-delà de leurs attentes : aujourd’hui, ils se retrouvent avec des dizaines d’employés, des bureaux dans trois villes, un chiffre d’affaires en pleine croissance et d’importantes liquidités dans leur entreprise. En fait, c’est dans leur entreprise qu’ils effectuent la majorité de leurs placements, puisqu’ils y ont laissé l’essentiel de leur avoir.
Depuis quelque temps, leur représentant en épargne collective, leur conseiller en sécurité financière et leur comptable les invitent à consulter un fiscaliste pour, peut-être, restructurer leurs affaires à l’aide d’une société de gestion. En quoi cela consiste-t-il?
Deux entreprises plutôt qu’une
Comme le résume ce diagramme, lorsqu’un entrepreneur met en place une société « de gestion », il se trouve à transférer à cette dernière la propriété de son entreprise, qui devient alors désignée comme sa société « d’exploitation ». En retour, l’entrepreneur obtient des parts de la société de gestion. Au bout du compte, il se retrouvera, généralement, à la fois employé de sa société d’exploitation, qui pourra lui verser un salaire, et actionnaire de sa société de gestion, qui pourra lui verser un dividende.
Avant d’esquisser l’intérêt de ce genre d’entreprise, il faut préciser que le droit fiscal est une pratique spécialisée qui peut donner lieu à des structures beaucoup plus complexes que celle-ci. En outre, plusieurs éléments de la réforme fiscale annoncée par le gouvernement fédéral au début de 2018 pourraient avoir une incidence sur la façon dont les entrepreneurs utiliseront, à l’avenir, leurs sociétés de gestion.
Voici néanmoins les trois principales raisons pour lesquelles un entrepreneur envisage, habituellement, de se doter d’une société de gestion.
La protection de l’actif
La société d’exploitation peut transférer à la société de gestion, sous la forme d’un dividende libre d’impôt, tout profit dont elle n’a pas besoin pour poursuivre ses activités. Elle se trouve ainsi à éloigner l’actif des actionnaires du risque d’affaires lié à la société d’exploitation. Imaginons par exemple qu’un client poursuive l’entreprise de Julie et Charles pour une faute grave commise par un employé, et qu’il gagne sa cause. Cette situation pourrait peut-être mettre la compagnie en péril mais, si l’avoir que Julie et Charles ont accumulé au fil de leurs longues années de labeur ne se trouve pas dans l’entreprise, il se pourrait qu’il soit mieux protégé des créanciers.
Qu’arrive-t-il, par ailleurs, si l’entreprise vient à avoir besoin de liquidités, par exemple pour une expansion, alors que celles-ci sont principalement dans la société de gestion? Cette dernière pourrait simplement lui retourner les sommes nécessaires sous la forme d’un prêt entre entreprises.
L’optimisation fiscale
Comme Julie et Charles, dans notre exemple, sont à la fois salariés (de leur entreprise) et actionnaires (de leur société de gestion), ils bénéficient d’une certaine souplesse lorsque vient le temps d’établir la nature de leurs revenus (salaires ou dividendes), leur montant, leur distribution entre eux, et le moment où ils les prélèvent.
La société de gestion pourrait également s’avérer un outil fort pratique dans le cadre d’une planification successorale.
La gestion des placements
Enfin, Julie et Charles peuvent utiliser leur société de gestion pour effectuer et gérer leurs investissements, que ce soit en vue de la retraite ou pour d’autres projets, par exemple investir dans l’immobilier, démarrer une autre entreprise ou aider un jeune entrepreneur à lancer sa propre startup. Ici aussi, cependant, il pourrait être essentiel pour eux d’obtenir de bons conseils comptables et fiscaux pour déterminer quels placements il est souhaitable – ou non – d’effectuer à travers une société de gestion.
Dernier point important à retenir : la création et le maintien d’une société de gestion comportent des coûts importants. Pour cette raison, on recommande généralement aux plus petits entrepreneurs, avec l’aide de leurs spécialistes, de s’assurer préalablement que les bénéfices de cette structure seront plus importants que les coûts qui y seront liés.
Les sources suivantes ont été utilisées dans la rédaction de cet article.
Yourmortgageoptions.ca, « Real estate investing Canada ».
Osler, « Federal Budget Briefing 2018 », 27 février 2018.
The Globe and Mail, « How to defer tax by using a holding company », mise à jour du 9 mai 2018.
Malek Laflamme, « Avantages d’un holding », 1er décembre 2015.
Connectcpa.ca, « What Is A Holding Company And Do I Need One? », 18 février 2017.
Les affaires, « Créer une société de portefeuille au bon moment », 20 octobre 2011.